Pour sa 25e édition, le prix 2023 de la Fondation Pierre & Louisa Meylan sera remis à l’ethnomusicologue et musicien Laurent Aubert ainsi qu’à l’Association Harmonia Helvetica qui œuvre pour la préservation et la promotion du patrimoine musical suisse
Laurent Aubert

Laurent Aubert

Laurent Aubert est honoré pour l’ensemble de sa carrière et en particulier son engagement pionnier en faveur des musiques du monde au sein des Ateliers d’ethnomusicologie et du département d’ethnomusicologie du Musée d’Ethnographie de Genève.

Ethnomusicologue et musicien né en 1949, Laurent Aubert est docteur en anthropologie de l’Université de Genève. Après quelques années consacrées à la pratique musicale, il est nommé en 1983 conservateur du Département d’ethnomusicologie et secrétaire général des Archives internationales de musique populaire (AIMP) au Musée d’ethnographie de Genève, poste qu’il occupera jusqu’en 2011. En 1983, il fonde aussi les Ateliers d’ethnomusicologie, un institut dédié aux musiques du monde.

Il a effectué de nombreuses recherches de terrain, en particulier dans le sous-continent indien, sur la musique savante de l’Inde du Nord (Aperçus sur la signification de la musique indienne, 1981), sur les castes de musiciens au Népal (Les musiciens dans la société Newar, 1988), sur les musiques et les danses rituelles du Kerala (Les Feux de la déesse, 2004, Sketches of Kerala, 2006) et sur les musiques du Cachemire liées au soufisme (Le Sûfyâna Kalâm de Srinagar, 2013). Ses travaux l’amènent aussi en Roumanie, où il contribue à une réévaluation de l’œuvre de l’ethnomusicologue Constantin Brăiloiu (La quête de l’intemporel, 1985; Mémoire vive, 2009). Il s’intéresse par ailleurs aux phénomènes de migration musicale et à l’effet des processus contemporains de mondialisation culturelle sur le devenir des traditions musicales, sujet de plusieurs de ses publications (notamment Musique à la croisée des cultures, 1995; La musique de l’autre, 2001; Musiques migrantes, 2005).

Commissaire scientifique de plusieurs expositions au Musée d’ethnographie de Genève – notamment Mondes en musique (1991), Théâtres d’Orient (1997), Le monde et son double (2000), Les feux de la déesse (2005), L’air du temps (2009), La saveur des arts (2011) –, il a également contribué à l’enrichissement de cette institution en établissant le catalogue raisonné de sa collection d’instruments de musique, en constituant sur le terrain une collection d’objets liés aux arts rituels du Kerala (1998-2003, environ 650 objets) et en faisant don au Musée de ses archives musicales personnelles. Il a aussi été le responsable scientifique de la collection de disques AIMP du Musée (plus de 100 CDs publiés entre 1984 et 2011).

Fondateur et directeur artistique des Ateliers d’ethnomusicologie jusqu’en 2018, il a programmé de nombreux festivals et saisons de concerts dédiés aux musiques «du monde» en collaboration avec divers partenaires européens. De 1984 à 1996, il a présenté à Genève les douze éditions du «Festival du Film des musiques du monde» avec son collègue René Fuerst. C’est également aux Ateliers qu’il fonde en 1988 les Cahiers de musiques traditionnelles, devenus Cahiers d’ethnomusicologie en 2007, seule revue francophone dédiée à l’ethnomusicologie (36 volumes parus à ce jour). Il a aussi organisé plusieurs réunions scientifiques, parmi lesquelles le «Séminaire européen d’ethnomusicologie» (1991), ou encore les colloques «Musiques migrantes» (2003), «Musique, chamanisme et possession» (2005), «Mémoire, traces et histoire» (2008) et «L’ethnomusicologie appliquée, pour qui? pourquoi?» (2014).

Auteur de nombreuses publications (livres, articles, CDs, DVDs), il a participé à des conférences internationales d’ethnomusicologie dans le monde entier. Il a été expert associé auprès de l’Unesco et de l’Académie Charles-Cros, ainsi que représentant de la Suisse au sein du Comité pour les arts extra-européens. Il a aussi travaillé comme journaliste et critique musical, notamment pour le Journal de Genève(1973-1982), pour le mensuel Le Monde de la Musique à Paris (1985-1998) et pour la Radio Suisse Romande (1985-1994).

En tant que musiciens, après avoir pratiqué le jazz et la musique médiévale européenne, il a étudié la musique indienne (sarod) avec le maître Jamaluddin Bhartiya, puis la musique afghane (rubab) auprès de Ustad Daud Khan Sadozai et la musique arabe avec Yousra Dhahbi. Il a participé à plusieurs projets musicaux, dont l’ensemble Nuryana, spécialisé dans l’interprétation des musiques d’Inde du Nord et d’Afghanistan, avant de fonder son propre groupe, Tarab, avec lequel il est toujours actif.

Association Harmonia Helvetica

L’Association Harmonia Helvetica est honorée pour son engagement inlassable depuis bientôt une décennie en faveur de la (re)découverte et de la diffusion au sein d’un large public et dans une démarche collaborative du patrimoine musical suisse.

Harmonia Helvetica est une association à but non lucratif qui œuvre activement pour la préservation et la promotion du patrimoine musical suisse. Elle se veut un trait d’union actif entre la recherche musicologique, les interprètes et le public. Fondée en 2014 par des amateurs.trices de musique passionnés par la recherche sur le répertoire moins connu, Harmonia Helvetica a été juridiquement constituée le 27 mai 2015 lors de sa première assemblée générale.

L’objectif
Conformément à ses statuts, l’Association entend faire connaître de nombreux auteurs.trices qu’elle jugera devoir bénéficier de cette promotion en raison de la valeur intrinsèque de leurs œuvres, indépendamment de toute considération circonstancielle de mode ou autre, que ce soient des compositeurs.trices vivant.e.s ou ceux/celles des générations passées, souvent injustement oublié.e.s. Elle ouvre en ce sens une fenêtre originale et intéressante sur les biens culturels du pays. Cette promotion du patrimoine musical suisse met l’accent sur la période du 18e siècle à nos jours ainsi que sur la Suisse romande. Harmonia Helvetica veut à l’avenir porter une attention particulière aux musiciennes.

Les activités
Grâce à la complémentarité des compétences des membres de son comité et des artistes œuvrant dans ce cadre, l’activité d’Harmonia Helvetica se déploie dans plusieurs secteurs:
• l’organisation de concerts dans différentes villes de Suisse romande;
• la mise en place de stages musicaux pour les élèves des écoles de musique;
• la réalisation de projets discographiques en première mondiale pour mieux diffuser le patrimoine musical suisse;
• l’édition de livres et de partitions ainsi que la mise sur pied de conférences et colloques.

L’équipe
Harmonia Helvetica est, depuis ses débuts, formée uniquement de bénévoles passionné.e.s par le patrimoine musical de ce pays. Son comité a été présidé par MM. Michel Cardinaux (2014-2015), Roger Hermann (2015-2023) et Marc Savary (depuis 2023). L’Association compte actuellement une septantaine de membres et bénéficie de l’appui de plusieurs fidèles sponsors, sans qui son travail serait impossible. Harmonia Helvetica collabore régulièrement avec des institutions suisses, soit l’Association Bernard Reichel, l’Association Caroline Boissier, la Fondation Jaques-Dalcroze et l’Association des Amis Jaques-Dalcroze, la Fondation Sylvia Waddilove, le Conservatoire de Genève et l’Université de Fribourg. Elle développe des partenariats avec la RTS et Passé simple, mensuel romand d’histoire et d’archéologie.

Les résultats
De nombreux concerts, en formation de musique de chambre, ont marqué les presque dix premières années de la vie d’Harmonia Helvetica, en particulier lors des publications discographiques. En 2020, l’Association s’est lancée dans la musique chorale et symphonique avec L’Enfant prodigue d’Henryk Opienski. En outre, elle a organisé des concerts en partenariat avec plusieurs institutions suisses (Patrimoine suisse, Lyceum Club…) et avec le concours de nombreux/ses musicien.ne.s. Le programme 2022-2023 a présenté une première saison musicale suisse.

Depuis 2019, Harmonia Helvetica a réalisé – le plus souvent en première mondiale – près d’une dizaine de CDs. En tout premier, le «Swiss Piano Works 1890-2008», reflet du premier concert donné en octobre 2015. Puis, une vaste anthologie, en trois disques, de la musique pour piano d’Emile Jaques-Dalcroze. Ensuite, un enregistrement des Concerti nos 5 et 6 pour piano de Caroline Boissier Butini et un disque de musique suisse du 20e siècle pour solo, duo et trio. «Les Saisons du cœur» ont été consacrées à Gustave Doret et son temps. Avec le Melos Ensemble de Vienne, l’Association a pu produire un CD consacré aux quintettes de Gustave Doret et Fritz Bach. Ces prochains jours, Harmonia Helvetica, en partenariat avec la Fondation Jaques-Dalcroze et l’Association des Amis Jaques-Dalcroze, présentera deux CDs consacrés aux Lieder d’Emile Jaques Dalcroze et à la suite de sa musique pour piano. Un projet est en cours pour les «petites pièces» de George Templeton Strong.

Du côté de l’édition, l’Association a publié l’ouvrage sur le compositeur genevois Charles Bovy-Lysberg, celui sur les partitions et les aquarelles du compositeur américain George Templeton Strong et la partition du 5e Concerto pour piano de la compositrice genevoise Caroline Boissier Butini. Harmonia Helvetica a activement soutenu la parution du livre consacré au compositeur Bernard Reichel. L’Association parraine cette année la parution chez Slatkine d’un livre du musicologue James Lyon sur l’histoire de la musique suisse comme réflexion sur l’identité culturelle du pays et les liens entre les régions.

Dans le domaine de la formation, trois week-ends musicaux, organisés en décembre 2017, en février 2020 et en janvier 2023 en partenariat avec les écoles de musique, en particulier celle de la ville de Cossonay, ont permis d’offrir ateliers, cours de maîtres pour les élèves, tables rondes, le tout couronné par des concerts donnés par les étudiant.e.s et des professionnel.le.s. Des perspectives s’ouvrent actuellement avec d’autres écoles de musique. Toucher les jeunes est une nouvelle priorité pour développer l’Association et la promotion du patrimoine.

www.harmonia-helvetica.ch